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E4 Proposition 44 Scolie

Scolie

L’allégresse, que j’ai dite être bonne, se laisse plus facilement concevoir qu’observer. Car les affects auxquels nous sommes en proie chaque jour, se rapportent pour la plupart à une partie du corps qui est plus affectée que toutes les autres, et ainsi les affects ont, pour la plupart, de l’excès, et fixent la mens dans la seule représentation d’un unique objet, de sorte qu’elle ne peut penser aux autres; et, quoique les êtres humains soient en proie à de nombreux affects, et qu’on en trouve rarement qui soient toujours en proie à un seul et même affect, il n’en manque pas cependant à qui un seul et même affect s’attache tenacement. Nous voyons en effet parfois des êtres humains à tel point affectés par un seul objet que – bien qu’il ne soit pas présent – ils croient pourtant l’avoir devant les yeux; et lorsque cela arrive à un homme qui ne dort pas, nous disons qu’il délire ou qu’il est fou. Et, comme ils provoquent le rire, l’on ne croit pas moins fous ceux qui brûlent d’amour et ne font nuit et jour que rêver d’une amante ou d’une courtisane. Mais lorsqu’un avare ne pense à rien d’autre qu’au lucre et à l’argent et lorsqu’un ambitieux ne songe qu’à la gloire, etc., on ne juge pas qu’ils délirent, parce qu’ils sont pénibles, et on estime qu’ils sont odieux. Mais en réalité, la cupidité, l’ambition, la lubricité etc. sont des espèces de délire, bien qu’on ne les compte pas au nombre des maladies.


Texte latin

Hilaritas quam bonam esse dixi, concipitur facilius quam observatur. Nam affectus quibus quotidie conflictamur, referuntur plerumque ad aliquam corporis partem quæ præ reliquis afficitur ac proinde affectus ut plurimum excessum habent et mentem in sola unius objecti contemplatione ita detinent ut de aliis cogitare nequeat et quamvis homines pluribus affectibus obnoxii sint atque adeo rari reperiantur qui semper uno eodemque affectu conflictentur, non desunt tamen quibus unus idemque affectus pertinaciter adhæreat. Videmus enim homines aliquando ab uno objecto ita affici ut quamvis præsens non sit, ipsum tamen coram habere credant, quod quando homini non dormienti accidit, eundem delirare dicimus vel insanire nec minus insanire creduntur qui amore ardent quique noctes atque dies solam amasiam vel meretricem somniant quia risum movere solent. At cum avarus de nulla alia re quam de lucro vel de nummis cogitet et ambitiosus de gloria etc. hi non creduntur delirare quia molesti solent esse et odio digni æstimantur. Sed revera avaritia, ambitio, libido etc. delirii species sunt quamvis inter morbos non numerentur.


Ascendances

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Descendances

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Références

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