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E4 Proposition 34 Scolie

Scolie

J’ai dit que Paul prend Pierre en haine, parce qu’il imagine que Pierre possède cette chose que lui-même, Paul, aime aussi; d’où il semble suivre au premier abord que ces deux hommes sont nuisibles l’un à l’autre parce qu’ils aiment la même chose et par conséquent s’accordent en nature; et ainsi, si cela est vrai, les propositions E4p30 et E4p31 seraient fausses. Mais si nous voulons examiner la question sur une balance équitable, nous verrons que tout cela s’accorde tout à fait.
En effet ces deux hommes ne sont pas pénibles l’un pour l’autre en tant qu’ils s’accordent en nature, c’est-à-dire que l’un et l’autre aiment la même chose, mais en tant qu’ils diffèrent l’un de l’autre. En effet, en tant que l’un et l’autre aiment la même chose, l’amour de chacun des deux est alimenté par là-même (E3p31) c’est-à-dire (E3da6), que par là-même la joie de chacun des deux est alimentée. Il s’en faut donc de beaucoup qu’il soient pénibles l’un pour l’autre en tant qu’ils aiment la même chose et s’accordent en nature. Mais la cause de cette situation, comme je l’ai dit, est tout simplement que – nous l’avons supposé – ils diffèrent en nature. Nous supposons en effet que Pierre a l’idée de la chose aimée qu’il possède maintenant, et Paul au contraire celle d’une chose aimée qu’il a perdue. D’où il résulte que l’un est affecté de tristesse et l’autre au contraire de joie; et que dans cette mesure ils sont contraires l’un à l’autre. Et nous pouvons facilement montrer de cette façon que toutes les autres causes de tristesse dépendent de cela seul que les êtres humains diffèrent en nature, et non pas de ce qu’ils s’accordent.


Texte latin

Dixi quod Paulus odio Petrum habeat quia imaginatur id eundem possidere quod ipse Paulus etiam amat; unde prima fronte videtur sequi quod hi duo ex eo quod idem amant et consequenter ex eo quod natura conveniunt, sibi invicem damno sint atque adeo si hoc verum est, falsæ essent propositio 30 et 31 hujus partis. Sed si rem æqua lance examinare velimus, hæc omnia convenire omnino videbimus. Nam hi duo non sunt invicem molesti quatenus natura conveniunt hoc est quatenus uterque idem amat, sed quatenus ab invicem discrepant. Nam quatenus uterque idem amat, eo ipso utriusque amor fovetur (per propositionem 31 partis III) hoc est (per definitionem 6 affectuum) eo ipso utriusque lætitia fovetur. Quare longe abest ut quatenus idem amant et natura conveniunt, invicem molesti sint. Sed hujus rei causa ut dixi nulla alia est quam quia natura discrepare supponuntur. Supponimus namque Petrum ideam habere rei amatæ jam possessæ et Paulum contra ideam rei amatæ amissæ. Unde fit ut hic tristitia et ille contra lætitia afficiatur atque eatenus invicem contrarii sint. Et ad hunc modum ostendere facile possumus reliquas odii causas ab hoc solo pendere quod homines natura discrepant et non ab eo in quo conveniunt.


Ascendances

Descendances

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Références

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