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E2 Proposition 17 Scolie

Scolie

Nous voyons ainsi comment il peut arriver que nous considérions comme présent ce qui n’est pas, comme c’est souvent le cas. Et il peut se faire que cela arrive encore pour d’autres causes, mais il me suffit ici d’en avoir montré une seule par laquelle je puisse expliquer la chose comme si je l’avais montrée par sa vraie cause ; je ne crois pas pour autant être très éloigné de la vraie, puisque tous les postulats que j’ai admis, ne contiennent à peu près rien qui ne soit établi par l’expérience, de laquelle il ne nous est plus permis de douter dès lors que nous avons montré que le corps humain existe tel que nous le sentons (E2p13c). En outre (E2p17c et E2p16c2), nous comprenons clairement quelle différence il y a entre l’idée, par exemple de Pierre, qui constitue l’essence de la mens de Pierre lui-même et l’idée du même Pierre qui est dans un autre homme, disons Paul. La première en effet exprime directement l’essence du corps de Pierre, et elle n’implique l’existence qu’aussi longtemps que Pierre existe ; mais la seconde indique plutôt l’état du corps de Paul que la nature de Pierre, et, par suite, tant que durera cet état du corps de Paul, la mens de Paul considère Pierre comme s’il lui était présent, même s’il n’existe plus. En outre, pour employer les mots en usage, les affections du corps humain dont les idées représentent les corps extérieurs comme nous étant présents, nous l’appellerons imgaes des choses même si elles ne reproduisent pas les figures des choses. Et, quand la mens contemple les corps de cette façon, nous dirons qu’elle imagine. Et ici, pour commencer d’indiquer ce que c’est que l’erreur, je voudrais faire observer que les imaginations de la mens considérées en elles-mêmes ne contiennent aucune erreur ; autrement dit, si la mens se trompe, ce n’est pas du fait qu’elle imagine ; mais c’est seulement en tant qu’elle est considérée comme privée d’une idée qui exclue l’existence de ces choses qu’elle imagine comme lui étant présentes. En effet si la mens, pendant qu’elle imagine comme lui étant présentes des choses qui n’existent pas, savait en même temps que ces choses n’existent pas en réalité, elle attribuerait cette puissance d’imaginer à une vertu de sa nature, et non point à un vice ; surtout si cette faculté d’imaginer dépendait de sa seule nature, c’est-à-dire (E1d7) si cette faculté qu’a la mens d’imaginer était libre.


Texte latin

Videmus itaque qui fieri potest ut ea quæ non sunt veluti præsentia contemplemur, ut sæpe fit. Et fieri potest ut hoc aliis de causis contingat sed mihi hic sufficit ostendisse unam per quam rem sic possim explicare ac si ipsam per veram causam ostendissem nec tamen credo me a vera longe aberrare quandoquidem omnia illa quæ sumpsi postulata, vix quicquam continent quod non constet experientia de qua nobis non licet dubitare postquam ostendimus corpus humanum prout ipsum sentimus, existere (vide corollarium post propositionem 13 hujus). Præterea (ex corollario præcedentis et corollario II propositionis 16 hujus) clare intelligimus quænam sit differentia inter ideam exempli gratia Petri quæ essentiam mentis ipsius Petri constituit et inter ideam ipsius Petri quæ in alio homine, puta in Paulo, est. Illa enim essentiam corporis ipsius Petri directe explicat nec existentiam involvit nisi quamdiu Petrus existit; hæc autem magis constitutionem corporis Pauli quam Petri naturam indicat et ideo durante illa corporis Pauli constitutione mens Pauli quamvis Petrus non existat, ipsum tamen ut sibi præsentem contemplabitur. Porro ut verba usitata retineamus, corporis humani affectiones quarum ideæ corpora externa velut nobis præsentia repræsentant, rerum imagines vocabimus tametsi rerum figuras non referunt. Et cum mens hac ratione contemplatur corpora, eandem imaginari dicemus. Atque hic ut quid sit error indicare incipiam, notetis velim mentis imaginationes in se spectatas nihil erroris continere sive mentem ex eo quod imaginatur, non errare sed tantum quatenus consideratur carere idea quæ existentiam illarum rerum quas sibi præsentes imaginatur, secludat. Nam si mens dum res non existentes ut sibi præsentes imaginatur, simul sciret res illas revera non existere, hanc sane imaginandi potentiam virtuti suæ naturæ, non vitio tribueret præsertim si hæc imaginandi facultas a sola sua natura penderet hoc est (per definitionem 7 partis I) si hæc mentis imaginandi facultas libera esset.​


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